Six heures du matin.
La camionnettte blanche vient tout juste de partir, et un vent froid, puissant, rentre par mes narines. Un bruit de fond, toujours présent, me fait grincer les dents, fermer les yeux. Je mets en place mes oreillettes, ce qui réduit (heureusement) ce flot de décibels qui ne cesse jamais.
En ouvrant les yeux, je découvre qu’un MD-80 de Swissair vient d’aterrir.
– Il y a 3600 à l’arrivée, et déjà 120 passagers enregistrés. On prévoit 4 tonnes au départ, on mettra les locaux dans la trois, les BT dans la deux, le fret et la poste dans la une. – La voix de Montibeller est à peine perceptible dans le fracas du 737 de la Sabena qui vient d’allumer ses réacteurs, juste à côté, en position 7. Un des avions les plus bruyants qui existent, je pense en regardant le Boeing s’éloigner.
Nous sommes en position 4. Juste à côté de la gare passagers de l’Aéroport International de Genève-Cointrin, plus connu dans le monde aéronautique par son sigle GVA.
Je suis le seul auxiliaire, ce matin, au chargement. Je prends le chariot jaune qui sert de transport aux cales, et je me dirige, plus endormi qu’autre chose, vers l’aire de stationnement. L’avion approche, et avec lui son bruit caractéristique. Au loin, je distingue le Jura qui reçoit les premiers rayons du soleil, encore trop caché pour nous recomforter. La journée allait être longue.
L’appareil freine, je prends deux cales, et je les coince entre les roues et le béton du tarmac. Quelqu’un a déjà pris deux cales et se dirige, lentement, vers le train d’aterrissage arrière, tandis que le pilote coupe les moteurs et éteint le gyrophare rouge sous le fuselage.
Je m’éloigne de l’appareil, et dès que les cales arrière sont en place, je fais signe au pilote, en joignant mes deux pouces, les poings fermés, que l’avion est assuré et que le débarquement des passagers peut commencer.
Trente secondes plus tôt, à cet endroit, il n’y avait personne. Maintenant, à part l’avion, on dénombre 6 chargeurs, deux camionnettes de HASCO (l’entreprise de nettoyage), un camion de Catering, les navettes des rouleurs apportant des dizaines de chariots vides ou pleins, sans compter les véhicules à essence et les nombreuses navettes de service qui rôdent autour de l’appareil. L’avion doit partir dans une heure, et il y a suffisamment de travail à faire avant que les passagers puisent monter à bord.