Question

Le vide. Insondable, mystérieux. Qui creuse les âmes, qui tend la pelouse de notre patience, qui la rend finalement inutile.

Les questions, celles-là, sans réponse, sans but, infinies, qui se succèdent, sans raison (apparente ?), comme le mystère même de la vie. Celui auquel on appartient, qui nous appartient. Tous et chacun possède et est son destin. Celui qui nous pousse à nous questionner, à découvir, à nous découvrir. A aimer.

L’amour, qui vient et qui s’en va sans prévenir, sans crier gare. Qui nous réjouit par son arrivée et qui nous deçoit profondément par son départ. Parfois. Souvent.

La violence, la haine. Elles détruisent avec un sourire, sans masque. Elles rongent, comme le vide. Sans poser des questions. Jour après jour, le serpent sévit, provoque, mord, et se mue en nous, disparaît, détruit nos rêves. Le mythe devient réalité, et l’histoire se repète depuis que l’on est, jusqu’a ce qu’on n’est plus. Et ce serpent nous détruit. Et il reapparaît, notre diable à nous, encore une fois, sous un autre masque. Drôle de combat que celui qui se livre en chacun de nous à chaque instant. Drôle de nature humaine. Heureux celui qui comprenne ce diable, qui le questionne, qui se comprenne. Heureux celui qui trouve une raison à son existence, qui trouve un âme pour complémenter la sienne. Pour combler son vide. Heureux aussi celui qui met fin à ses questions, puisse son âme vide justifier la gâchette qui se referme, le bruit qui comble le vide d’un coup, mais qui en même temps l’éloigne définitivement des questions, de la haine, de l’amour, de l’indifférence. Maigre victoire.

Haine, indifférence, amour, haine, indifférence, amour… Un cercle, un chemin illimité, sans bornes autres que celles que notre volonté (nous ?) impose. A nous de te briser, cercle vicieux qui tournes autour de notre âme vide. Entre amour et haine, une limite indécente, mince, invisible qui permet tous les excès et tous les plaisirs. Facilement franchissable. Trop.

Nous. Nous qui ? Vague essai d’appartenance, d’identification. Mot banal, inutile, «nous». Chacun possède les mots pour exprimer ces pensées au fond de son âme. Certains chanceux les possèdent au fond de son coeur, s’il en ont un. Certains n’ont pas à en avoir, ils en partagent un. A chacun de se comprendre, les bouches sont sottes et ne s’ouvrent que pour mentir, au bout du compte. A chacun sa vérité, heureux celui qui s’écoute. Puisse-t-il (puissions nous) s’identifier, en quelqu’un, en quelque chose; serait-ce le but d’une vie ? Serait-ce la définition d’aimer ?

Le temps, allié de celui qui ne sent plus ni la haine, ni l’indifférence, ni l’amour. Tout lui est possible, tout lui est atteignable. Aucune crainte, aucune limite. Mille et une fois il pourra tourner autour du cercle infâme sans jamais en ressortir, à moins que… Non, honneur oblige de rester là. Drôle de nature humaine, plutôt animale, qui nous préserve du départ alors que rien ne nous oblige à perpétuer la mémoire. Le temps s’arrête autour de certains d’entre nous, avec juste quelques souvenirs pour nous rappeler notre nature éphémère.

Des souvenirs. Des entraves, des larmes, voilà ce qu’est la mémoire, voilà de quoi ils sont faits, les souvenirs. Des regrets d’une nature temporelle irréversible qui ne font rien d’autre qu’ajouter leur grain de sel sur la plaie ouverte de notre âme vide.

De mon âme vide.

Le noir. L’absence. Ce qui remplit ce que les souvenirs laissent, le vide, en disparaissant. Tout disparaît. Même les questions. Plus vide que le vide même, l’abîme n’existant que parce qu’on y pense. Que parce qu’on essaie de le comprendre, que parce qu’on se pose des questions.

Nous aussi, nous n’existons que parce que l’on se rappelle de nous. La mémoire collective, en quelque sorte, même si cette collectivité ne comporte qu’un seul individu. Un but, assez élevé, d’ailleurs, que d’être aimé. Mais encore plus élevé, encore plus difficile, c’est aimer…

Aimer et être aimé (ou vice-versa), se poser des questions, à deux. Pas deux fois les mêmes questions, mais plutôt deux réponses, non ?